Le 27 mars 2023 s’est tenu dans le salle des fêtes de Meymac une table ronde dans le cadre de la mission d’information parlementaire sur « l’adaptation au changement climatique de la politique forestière et la restauration des milieux forestiers ». Le Groupe Forêt du Syndicat de la Montagne Limousine était convié à la table des associations pour présenter ses actions ainsi que pour faire part de ses principaux constats et de ses principales propositions. Voici un extrait de son intervention.
Présentation du Groupe Forêt
Le Syndicat de la Montagne Limousine est une association d’habitantes et d’habitants du Plateau de Millevaches qui se regroupent pour défendre des intérêts communs sur le territoire. Il est constitué de plusieurs groupes qui s’intéressent à de nombreux sujets à l’échelle locale : transports, entraide administrative, soutien psychologique, accueil des exilés, logement, eau, éducation… et bien sûr forêt.
Depuis plus de deux ans nous, le groupe forêt, nous mobilisons et nous intéressons à la gestion des forêts (et des plantations) sur le Plateau de Millevaches, dans l’enceinte du Parc Naturel Régional. Nous œuvrons pour un changement des pratiques forestières actuelles. Nous considérons que ces pratiques sont d’arrière-garde.
Les actions du Groupe Forêt, pour n’en citer que quelques-unes, sont les suivantes :
– Nous organisons des formations à la sylviculture « douce » (gestion durable, futaie irrégulière, couvert continu),
– Nous veillons activement à la sauvegarde des forêts de feuillus grâce à l’outil numérique VigieFeuillus que nous avons développé,
– Nous rencontrons des acteurs de la filière bois pour comprendre leurs enjeux, leurs conditions de travail et dialoguer avec eux,
– Nous organisons des évènements : par exemple la marche en 2021 pour des forêts vivantes de Meymac à Millevaches, regroupant près de 500 personnes,
– Nous soutenons des luttes locales comme celle récente du Bois du Chat.
Principaux constats
Le principal constat que nous faisons, comme beaucoup d’associations autour de cette table mais aussi d’autres acteurs de la filière, est le suivant : la coupe rase, que ce soit sur des plantations de résineux ou sur des forêts de feuillus est de loin la pratique majoritaire pour récolter du bois sur le plateau de Millevaches et ses alentours.
Ces coupes rases, complétées bien souvent par le dessouchage entraînent l’érosion des sols, leur tassement et donc leur désertification, la disparition de certaines espèces et une érosion générale de la biodiversité.
Nous constatons également que les forêts de feuillus, diversifiées et pleine de vie, sont massivement rasées pour y replanter des résineux. Le sapin de douglas est l’arbre le plus planté, alors que cet arbre n’est pas bien adapté au changement climatique. Notons aussi que les résineux captent une plus grande quantité d’eau que les feuillus.
Qui plus est, le modèle sylvicole actuel a des conséquences notoires sur le cycle de l’eau. Le PNR y fait allusion dans son journal de février, où l’eau est qualifiée « d’or bleu menacé par le changement climatique ». Nous constatons aussi qu’il est fréquent que des cours d’eau soient détériorés lors des interventions forestières.
Autres constats, tout ce bois prélevé part parfois loin et dans des usages qui se valorisent peu économiquement (comme la plaquette pour bois énergie par exemple). Par ailleurs le modèle actuel a des répercussions sur le plan économique et sur le plan social. Parmi elles :
– Fermetures de scieries locales à taille humaine et donc perte d’emplois,
– Routes dégradées par le passage des grumiers et donc problèmes de sécurité routière,
– Bûcherons sous-payés, avec un statut précaire, alors que c’est une des professions les plus dangereuse au monde,
– Entrepreneurs de travaux forestiers pressurisés par des contrats d’approvisionnement, pressurisés par des objectifs de rendement et de rentabilité, pressurisés par le remboursement de leurs machines aux coûts exorbitants.
Ces pratiques sont subventionnées par de l’argent public, les aides de la régions et/ou le plan de relance.
D’après l’association Canopée Forêts Vivantes : Le gouvernement a fléché 200 millions d’Euros vers la filière forêt-bois et 87% des projets financés par le plan de relance impliquent des coupes rases.
Enfin, les Plans Simples de Gestion (PSG) ne sont pas publics ce qui opacifie la gestion forestière et ses financements.
Principales propositions
Ainsi nos principales propositions sont les suivantes :
– Premièrement, nous souhaitons que les Plans Simple de Gestion soient rendus publiques et que tout un chacun puisse les consulter.
– Deuxièmement que la pratique du dessouchage soit interdite,
– Ensuite qu’ait lieu un reflêchage des financements (plan de relance et aides de la régions) vers des pratiques sylvicoles plus respectueuses de l’humain et de l’environnement : sylviculture douce, couvert continu, futaie irrégulière, petites scieries locales.
– Enfin nous souhaitons une législation interdisant formellement la pratique de la coupe rase sur les forêts de feuillus (futaies et accrus), cela pour les préserver et avoir des forêts d’avenir, mais aussi pour éviter qu’elles ne soient remplacées par des plantations de résineux. Pour rappel, nos voisins suisses ont déjà interdit toute coupe rase depuis 1902 !
Nous sommes aujourd’hui conscients de tous les services que nous rendent les forêts ! Nous savons aussi à quel point la tâche d’adaptation au changement climatique qui nous attend est grande ! En effet, le climat change vite et les catastrophes sont plus fréquentes ! Canicules, incendies, sécheresses, grêle, inondations, ouragans, on a même eu une tornade en Creuse il y a à peine quelques semaines ! Les forêts endémiques, vivantes et diversifiées, sont plus résilientes face au changement climatique.
La restauration des milieux forestiers est donc cruciale pour le climat, la biodiversité et l’Humanité, elle est indispensable pour notre santé et celle de la planète !